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Á propos de l’offensive ukrainienne à Kharkiv et les conditions pour une défaite militaire de Poutine

L’offensive ukrainienne réussie à Kharkiv montre la voie pour la victoire dans la guerre.

Par: Ivan Razin
12 septembre 2022

Les forces ukrainiennes ont mené une offensive réussie à Kharkiv. Pour la deuxième fois pendant la guerre, la classe ouvrière ukrainienne a contraint l’occupant russo-facho [1] à une fuite humiliante. En quelques jours, les soldats de l’armée et des défenses territoriales [ukrainiennes] ont libéré plus de territoires que ce que l’armée russe avait réussi à occuper depuis avril. Ils ont notamment libéré d’importantes villes comme Koupiansk et Izioum, menaçant l’approvisionnement de tout un détachement [russe] à partir de Belgorod, et le forçant à battre en retraite en toute hâte. La population des villes et villages libérés a accueilli les combattants ukrainiens avec joie.

Cette offensive se déroule dans des conditions apparemment impossibles. Sur le front, les Ukrainiens font face à une armée bien mieux équipée. Les gouvernements occidentaux ne fournissent pas l’armement nécessaire en quantité suffisante. L’aide humanitaire, indispensable sur le front, est commercialisée à l’arrière. Le gouvernement Zelensky fait passer des lois hostiles aux travailleurs et dans l’intérêt des oligarques, confisquant les salaires civils des combattants. Le succès de l’offensive est dû entièrement à la population ukrainienne.

Si tout dépendait que de l’héroïsme, Poutine aurait été vaincu depuis longtemps. L’offensive ukrainienne et la fuite des occupants n’ont pas seulement montré que Poutine peut être vaincu. Cette offensive a montré également que la tâche la plus urgente est de vaincre Poutine militairement, et elle a montré comment on peut y arriver.

Deux armées

Dans le dernier numéro de notre journal Vyzvalnnya[2], nous avons écrit qu’en Ukraine s’affrontent deux armées bien différentes du point de vue militaire. Et c’est bien ce qui s’est manifesté lors des événements récents dans la région de Kharkiv.

L’Ukraine est défendue par sa classe ouvrière. Elle se bat massivement pour sa terre, ses foyers et ses familles, que ce soit au front, sous l’occupation ou à l’arrière. Mais elle manque d’armes lourdes.

L’armée de Poutine, par contre, dispose d’énormes quantités d’armement, mais il lui manque des gens pour se battre, pour utiliser ces armes. Même les travailleurs russes intoxiqués par la propagande [gouvernementale] ne veulent pas aller à la guerre. Poutine ne parvient pas à les mobiliser pour les tranchées. Il est contraint de recruter des mercenaires parmi les populations marginales et très appauvries aux quatre coins de la Russie, et parmi les populations encore plus opprimées [vivant à l’intérieur de la Fédération de Russie]. Les réserves de Poutine sont limitées à ce qui reste d’une société en décadence. Prigozhin, surnommé le cuisinier de Poutine[3], fait personnellement le tour des prisons, ramassant les criminels les plus grossiers pour les envoyer au front. La « bravoure militaire » de cette racaille humaine s’exprime principalement dans la capacité d’occuper des ruines vides, de procéder à des pillages et des viols, d’utiliser la brutalité contre la population des territoires occupés. Mais une telle « armée » commence à s’effriter lorsqu’elle est confrontée à une force vivante.

Deux tactiques de guerre

L’armée russe est incapable de mener une guerre mobile : la mobilité exige un bon entraînement, une motivation et une disposition à y mourir. Les unités russes bien entraînées ont déjà été éliminées, et la racaille n’a ni le moindre entraînement, ni l’engagement, ni le dévouement et le moral. Á l’armée russe le conviendrait la guerre classique du 20e siècle, avec un front statique, peu mobile, et la capacité de bombarder continuellement les positions de l’ennemi à grande distance et d’éviter une confrontation face à face. Lors de l’offensive dans le Donbass, l’armée russe a pu imposer ce type de guerre, entraînant de lourdes pertes parmi les combattants ukrainiens.

La tactique avantageuse pour le camp ukrainien est le combat mobile, avec de petites unités bien motivées agissant à courte distance, réduisant le rôle de l’artillerie, avec des armes de production et d’utilisation relativement simples, imposant une confrontation face à face et tendant à converger avec les actions de résistance dans les territoires occupés. C’est exactement ce type de guerre que les combattants ukrainiens ont réussi à imposer lors de l’offensive à Kharkiv.

L’extension de cette tactique victorieuse au front nécessite des mesures adéquates à l’arrière.

La victoire à Kharkiv est un exemple du grand succès des tactiques asymétriques, adaptées à la supériorité en combattants qui sont toutefois dépourvus d’armement lourd. Et cette tactique asymétrique réussie doit être étendue. Pour ce faire, il faut :

• Assurez des provisions pour la principale force de résistance – les travailleurs au front – et pour leurs familles à l’arrière, avec tout ce dont ils ont besoin ;

• Développer l’organisation militaire sur le principe des unités mobiles de défense du territoire, qui ont montré leur efficacité, ainsi que l’entraînement universel à l’usage des armes de la population, et de l’armement de celle-ci.

• Donner priorité dans les usines à la production d’armements et de tous les produits nécessaires, dans le cadre d’un plan unique de défense nationale.

La politique du gouvernement ukrainien est à l’opposé.

Entre-temps, le gouvernement utilise la tactique inverse. Au lieu de développer des tactiques asymétriques, il mise sur une guerre symétrique en armements, ce qui signifie de grandes pertes et la condamnation d’avance à la défaite. Au lieu de mettre en place sa propre production d’armes et un plan de défense unifié à l’échelle nationale, il attend les armes occidentales, qui n’arrivent jamais en quantité suffisante ; il ferme les entreprises ukrainiennes parce qu’elles ne sont pas « rentables » pour les oligarques ; et il licencie les travailleurs, divisant l’Ukraine en une partie militaire et une partie où « il n’y a pas de guerre », comme s’il y avait deux Ukraine. Au lieu de garantir des provisions pour les travailleurs au front et pour leurs familles à l’arrière, et d’aider les réfugiés, il applique des lois anti-ouvrières, commercialise l’aide humanitaire et alimente un marché noir du logement. Au lieu de l’extension du rôle des escadrons de défense territoriale, et la mise en œuvre d’une formation militaire universelle et de l’armement du peuple, ce que nous voyons, ce sont des pots-de-vin versés par les riches pour qu’ils n’aient pas à servir dans l’armée, et un recrutement axé sur les militants ouvriers pour affaiblir les luttes de la classe ouvrière dans les usines.

Pour le succès de la classe ouvrière sur le front, il faut également le succès à l’arrière.

Pour mettre en œuvre les mesures nécessaires, on ne peut faire confiance ni aux gouvernements occidentaux ni au gouvernement Zelensky. Il est nécessaire que les travailleurs d’Ukraine prennent en main la tâche de défendre le pays, à la fois sur le front et à l’arrière.

Non à la fermeture des entreprises et au licenciement de travailleurs ! La classe ouvrière doit prendre les usines sous son propre contrôle, et organiser la production des produits nécessaires à la défense, en liaison avec les travailleurs du front.

Aucune atteinte aux intérêts des travailleurs de la part des propriétaires des usines ! Pour l’annulation des lois anti-ouvrières du gouvernement ! Pour un approvisionnement complet des travailleurs du front et de leurs familles ! Emprisonnement avec confiscation des biens de tous ceux qui font du commerce avec l’aide humanitaire ! Pour le contrôle de l’aide humanitaire par les travailleurs !

Pour l’entraînement militaire universel par lieu de résidence, armement et expansion des Unités de Défense territoriale. Arrestation et confiscation des biens de ceux qui « achètent des exemptions » du service militaire.

Pour la défaite totale de Poutine !

L’Ukraine peut et doit gagner.

Tout pour la victoire de l’Ukraine !

Gloire à l’Ukraine !

____________________________

[1] Traduction approximative de rashisty, le terme utilisé en Ukraine pour désigner l’occupant.

[2] Libération, un journal de Biélorussie

[3] Prigozhin est un oligarque russe, bras droit de Poutine, propriétaire de plusieurs entreprises, dont une chaîne de restaurants au service du gouvernement, d’où le surnom de « cuisinier de Poutine ». Il est le patron du groupe de mercenaires Wagner, qui combat en Ukraine et dans un certain nombre d’autres pays. Plus d’informations sur le groupe Wagner ici et ici.

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