mer Déc 25, 2024
mercredi, décembre 25, 2024

QUELQUES REFLEXIONS A PROPOS DE LA MOBILISATION CONTRE LE PASSE SANITAIRE EN FRANCE

Par Michael Lenoir

Covid-19 et vaccination : des effets politiques et sociaux différenciés selon les pays

On peut être certain que la pandémie de Covid-19 est loin d’avoir fini de produire ses effets politiques et sociaux. A cette étape, on constate que les souffrances populaires et le mécontentement social ne débouchent pas sur les mêmes exigences et revendications dans les différents endroits du monde. En Amérique latine, en Afrique, en Asie, l’exigence d’une vaccination pour toutes et tous joue un rôle prééminent ; dans certains pays d’Europe, on trouve des mouvements anti-vaccination assez influents.

C’est en particulier le cas en France. Au-delà même des « anti-vax », la vaccination est largement conçue comme un choix individuel – celui de se faire vacciner, ou pas – et l’idée d’une vaccination obligatoire ou l’usage de moyens politiques détournés pour y parvenir, provoquent un tollé et font descendre des centaines de milliers de personne dans la rue. Mais ce qui cristallise actuellement la colère montante en France, c’est la question du passe sanitaire.

Marée montante de la contestation

C’est l’intervention télévisée de Macron le 12 juillet qui a mis le feu aux poudres. Dès le 14, on a vu les rues d’un nombre croissant de villes françaises – quelques grandes cités, mais aussi et peut-être surtout des moyennes ou même petites – se remplir d’un nombre croissant de manifestant.es. Après la contestation lors de la Fête nationale du 14 juillet, les quatre samedis qui ont suivi semblent avoir renoué avec les mobilisations hebdomadaires de la période des Gilets jaunes, dont il subsiste des groupes actifs dans d’assez nombreux endroits. Précisons d’ailleurs que dans bon nombre de villes, ces derniers ont joué un rôle important dans la participation à ces manifestations, et même dans leur impulsion. Toutefois, on constate à nouveau, un peu à l’instar du mouvement des Gilets jaunes lui-même, que, dans cette marée montante, une large fraction des participant.es sont des primo-manifestant.es. Il s’agit donc de personnes, le plus souvent inorganisées politiquement et syndicalement, et qui n’avaient pas participé à la mobilisation des Gilets jaunes. Quelle fraction de ces manifestant.es descend ainsi pour la première fois dans la rue ? Des études nous apporteront vraisemblablement de telles précisions prochainement, mais les témoignages vont tous dans le sens d’une forte proportion.

Le 14 juillet marque le début de la vague de manifestations. A partir de cette date, certaines villes de province, petites ou moyennes vont connaitre une mobilisation exceptionnelle. Certaines d’entre elles vont devenir des moteurs de la mobilisation. C’est le cas, notamment, de Besançon (117 000 hab.) qui, selon des comptages militants, a vu défiler 850 personnes le 14 juillet, 2 000 le 17, entre 3 200 et 3 500 le 31. C’est peut-être encore plus vrai aussi de Chambéry (60 000 hab.) où des témoignages militants citent les chiffres de 2 000 participants le 14 juillet, entre 3 000 et 4 000 le 17, 5 000 à 6 000 le 24, tandis que la police en comptait encore 4 000 le 31.

Toutes les villes grandes ou moyennes, et même des petites villes (par exemple Lons-le-Saunier, 18 000 hab.)se sont, à un moment où un autre, lancées dans la contestation de la politique de Macron et en particulier du passe sanitaire. On est ainsi passé, selon les chiffres de la police – qui, tout particulièrement sous Macron, a toujours minimisé, parfois de façon grotesque, la participation aux manifestations – entre le 14 juillet et le 7 août :

  • de quelque 17 000 manifestant.es dans toute la France le 14 juillet
  • à au moins 136 rassemblements et près de 114 000 manifestant.es le 17 juillet
  • puis à 168 cortèges et 161 000 manifestant.es le 24 juillet
  • puis à 180 rassemblements dans tout le pays et 204 090 manifestant.es le 31 juillet
  • et à 198 rassemblements dans tout le pays et 237 000 manifestant.es le 7 août

Tout au long de ces dernières semaines, on a vu à la fois la participation aux manifs augmenter tendanciellement dans les villes qui se sont lancées tôt dans le mouvement, et l’organisation de manifs dans des villes jusque-là non touchées par la mobilisation.

Si le cadre politique de ces manifestations diffère d’une ville à une autre, l’essentiel est que l’on voit défiler à la fois des prolétaires, des classes populaires et des éléments de la petite bourgeoisie. Plusieurs témoignages vont dans le sens de manifs plus interclassistes que les Gilets jaunes, par exemple. On note la présence de certains courants de l’extrême-droite, des complotistes et des anti-vax, mais pas partout et leur rôle est loin d’être dirigeant. L’ambiance générale est plutôt contre le passe sanitaire t contre Macron en tant que tel, et l’exigence de « liberté » ressort partout. Même si derrière ce mot, on trouve beaucoup de confusion. Ce qui semble ressortir de ces premières semaines de mobilisation, c’est que là où des militant.es syndicalistes ou politiques lutte de classe, ou des Gilets jaunes sont présent.es les fachos et les anti-vax ont plus de mal à s’imposer, voire même sont inexistants.

Le cas de Paris est intéressant de ce point de vue : dans la capitale, la Préfecture de police annonçait 18 000 manifestant.es au total le 17 juillet[1], le plus gros cortège étant celui appelé par Florian Philippot (ex-dirigeant du Front national, qui a fondé son parti, Les Patriotes), mais on notait déjà une autre manif, 1 500 personnes environ défilant autour de Gilets jaunes. Le 31 juillet, le ministère de l’intérieur annonçait 14 250 manifestant.es à Paris, où 4 cortèges parcouraient divers secteurs de la capitale (deux gros et deux petits). Le plus important (Villiers-Bastille) était celui appelé, notamment, par la plupart des Gilets jaunes. Celui-ci était clairement conçu comme une alternative à l’extrême droite et aux opérations de récupération électorale de Florian Philippot, qui s’est déjà déclaré candidat à la présidentielle de 2022. Il semble donc que par rapport au 17 juillet, le rapport de forces entre le courant lié aux Gilets jaunes et celui animé par le mouvement de Philippot se soit inversé.

Au moment où nous bouclons cet article, les détails manquent encore à propos du 7 août, mais une chose est sûre : cette remobilisation populaire, qui semble adopter à nouveau un rythme hebdomadaire, en plein cœur de l’été, est révélatrice d’un très profond mécontentement. Qui, dans la sphère militante, s’attendait à cela, au beau milieu de la saison des vacances ? Il importe de bien en saisir les causes, de démêler les faits des apparences, de faire la part des idées fausses ou confuses et des vraies raisons de la révolte, pour comprendre ce qui est en jeu avec cette mobilisation sociale, certes minoritaire, mais clairement croissante. Pour cela, il convient de revenir d’abord sur la prestation télévisée de Macron le 12 juillet.

L’allocution de Macron

Même si le mécontentement social possède des racines profondes et s’il existe des spécificités culturelles en France, notamment en ce qui concerne les rapports de la population à la santé publique – en particulier la vaccination –, le discours présidentiel apparaît clairement comme le déclencheur du mouvement en cours. Cette remarque vaut, sans doute, aussi bien au niveau de la forme que du fond des annonces de Macron. La personnalité et le style de celui-ci incluent des constantes qui, semblent vouées à jeter systématiquement de l’huile sur le feu – on sait d’ailleurs qu’elles ont déjà contribué à de puissantes mobilisations sociales depuis 2017 –: l’arrogance, la suffisance, un mépris palpable des gens « qui ne sont rien »[2], au-delà des bobards et des contradictions de l’exécutif, transpirent dans la plupart de communications présidentielles, et tout cela contribue grandement à exaspérer une population dont une grande partie voit clairement que les dirigeants du pays mentent et trichent, en plus de la mépriser. Cette fois-ci, en affichant de plus sa volonté de diviser le pays entre bons et mauvais citoyens, il parait avoir encore fait mouche !

Macron a tenu à s’auto-féliciter pour l’efficacité prétendue de sa gestion sanitaire, alors qu’une étude récente montrait que son refus, contre l’avis du conseil scientifique, de confiner dès février, et d’attendre les vacances scolaires de printemps pour le faire, avait coûté un supplément de quelque 160 000 cas de Covid-19 long, de 112 000 hospitalisations dont 28 000 en réanimation, et de plus de 14 000 morts[3]. Les familles des victimes apprécieront l’autosatisfaction présidentielle ! Il s’est également vanté d’avoir fait « le maximum pour notre jeunesse ». Il nous a servi le plat frelaté d’une prétendue « relance forte et profitable à tous », se fondant sur des chiffres manipulés et tendancieux. Les étudiant.es désespéré.es et les victimes de licenciements seront aussi heureux/ses d’apprendre par la bouche du président que la France est le pays le plus attractif d’Europe depuis deux ans. Mais attractif pour qui ? Pour les capitalistes, évidemment !

Au-delà de ces auto-satisfecit mensongers et exaspérants, une grande partie du discours présidentiel concernait les mesures sanitaires – ou prétendues telles – qui viennent d’être décidées. Et c’est ici que la gestion voulue par l’Elysée est venue heurter de plein fouet les sentiments, les doutes et les appréhensions d’une grande partie de la population, en créant implicitement une sorte de sous-catégorie de mauvais.es citoyen.nes, à punir et à mettre au pas pour avancer dans la réponse macronienne à la crise sanitaire. Toutefois, dans les propos du locataire de l’Elysée, on perçoit à la fois, et paradoxalement, des hésitations, de l’arrogance et une nouvelle fois, la volonté de passer en force. Des hésitations, car il déclare : « Nous devons aller vers la vaccination de tous les Français, car c’est le seul chemin vers le retour à la vie normale » ; et il ajoute peu après : « nous devrons sans doute nous poser la question de la vaccination obligatoire pour tous les Français, mais je fais le choix de la confiance et j’appelle nos concitoyens à aller se faire vacciner des aujourd’hui ». Tout ceci semble un tantinet contradictoire. Si confiance il y a, le moins qu’on puisse dire est qu’elle n’apparaît pas clairement ! Mais si c’est toute la population qui doit être vaccinée, pourquoi – dans la logique autoritaire macroniste – ne pas avoir décidé justement de rendre la vaccination obligatoire ?

Cette logique autoritaire et la volonté de diviser la population en distribuant les bons et les mauvais points apparaît dans cette phrase de Macron : « Partout, nous aurons la même démarche : reconnaître le civisme et faire porter les restrictions sur les non-vaccinés plutôt que sur tous ».

C’est en fonction de cette logique que le président-de-pas-tous-les-Français/ses a décidé ce qui suit : « Dans un premier temps, pour les personnels soignants et non-soignants des maisons de retraite, des cliniques, des hôpitaux, des établissements pour les personnes en situation de handicap, pour les bénévoles qui travaillent au contact des personnes âgées ou fragiles, y compris à domicile, la vaccination sera rendue obligatoire sans attendre. Cela participe de votre sens du devoir. Pour tous nos compatriotes concernés, ils auront jusqu’au 15 septembre pour se vacciner. Il faut commencer dès maintenant ; à partir de septembre, des contrôles seront opérés, des sanctions seront prises ».

« Dès le 21 juillet, le passe sanitaire sera étendu aux lieux de culture et de loisirs. Concrètement, pour tous nos compatriotes de plus de 12 ans, il faudra, pour accéder à un spectacle, un parc d’attraction, avoir été vacciné ou présenter un test négatif récent […] A partir du début du mois d’août, le passe sanitaire s’appliquera dans les cafés, restaurants, centres commerciaux, hôpitaux, maisons de retraite, établissements médico-sociaux, avions, trains et cars pour les longs trajets. Là encore, seuls les vaccinés et les personnes testées négatives pourront accéder à ces lieux. Qu’ils soient d’ailleurs clients, usagers ou salariés. En fonction de l’évaluation de la situation, nous nous poserons la question de l’extension du passe sanitaire à d’autres activités encore. Cet automne, les fameux tests PCR seront rendus payants  ».

Lors de la première vague, Macron appelait à applaudir les soignant.es. Maintenant il les divise en prenant le reste de la population à témoin, et annonce des sanctions et des licenciements contre celles et ceux qui refuseraient le vaccin. Toujours les sanctions, jamais l’explication ou la pédagogie. Et rendre les tests PCR payants est aussi une mesure injuste car elle n’impacterait pas de la même façon riches et pauvres, alors que l’on sait que même des personnes vaccinées peuvent être infectées avec des variants actuels (dont le Delta), et qu’on ignore ce qui se passera avec les variants à venir. Mais comme Macron n’en est pas à une contradiction béante près entre son discours et ses choix politiques, il a néanmoins conclu son laïus par un vœu pour le pays : « … une France unie, qui sait être solidaire, civique, responsable, dans l’épreuve comme dans la conquête »… !!!

Toutefois, n’oublions pas les mauvaises nouvelles qu’il nous a apportées pour ce qui est de sa politique économique et sociale avant de conclure son discours. Macron n’a pas omis de nous rappeler qu’il était toujours le président des ultra-riches. D’abord, « la réforme de l’assurance chômage sera pleinement mise en œuvre dès le 1er octobre, autour d’une réalité simple : en France, on doit toujours bien mieux gagner sa vie en travaillant qu’en restant chez soi, ce qui n’est actuellement pas toujours le cas ». Ce discours moralisateur aux relents pétainistes annonce l’appauvrissement certain – simplement reporté de trois mois – des catégories sociales précaires, notamment dans le domaine de la culture, malgré les luttes qui se sont déroulées récemment contre cette attaque funeste du gouvernement. Et la « réforme » – c’est-à-dire la casse – des retraites a également été mise en avant : « nous devrons engager la réforme des retraites […] Oui, l’âge de départ doit être plus tardif ». Mais « je ne lancerai pas ce changement avant que l’épidémie soit sous contrôle et la reprise bien assurée »… On se demande d’ailleurs pourquoi. Puisqu’il a pour objectif et pour fonction de briser ce qui reste des conquêtes sociales du siècle passé, pourquoi ne pas le faire aussi maintenant ? Mais peut-être que cela compliquerait un peu plus sa réélection l’an prochain.

Des choix, des méthodes et un discours exaspérants

Convaincre plutôt que contraindre, c’est d’ailleurs la préconisation de l’OMS. Et le lendemain même du discours de Macron, Angela Merkel rappelait que l’Allemagne s’opposait à la vaccination obligatoire, et déclarait dans une conférence de presse : « Je ne pense pas qu’on puisse gagner la confiance en changeant ce que nous avons dit, c’est-à-dire pas de vaccination obligatoire », et ajoutant : « je pense que nous pouvons gagner la confiance en faisant de la publicité pour la vaccination et aussi en laissant autant de personnes que possible dans la population (…) devenir des ambassadeurs du vaccin à partir de leur propre expérience »[4]. Or il existe aussi un mouvement anti-vax en Allemagne. A l’intérieur même du capitalisme et dans le cadre des gouvernements bourgeois – avec toutes les tares et les limitations que cela implique – de la gestion de la pandémie, il existe bien des méthodes et des styles différents. La macronie a fait, dès le début, des choix autoritaires. Pourquoi la menace et les sanctions plutôt que l’explication, la conviction, la formation ? Pourquoi rendre maintenant la vie très compliquée, voire impossible, à une catégorie de la population (les non vacciné.es), même pour faire des courses ? Pourquoi stigmatiser celles et ceux qui sont réticent.es à la vaccination mais qu’une autre approche, un autre discours pourrait conduire à se protéger et à protéger les autres au moyen du vaccin? Cela, alors que les inquiétudes face au vaccin ont clairement diminué  depuis le mois de janvier, et que parmi les non-vacciné.es, il existe encore un nombre non négligeable de personnes hésitantes, en plus des gens déterminés à ne pas être vaccinés contre le Covid-19. Dans cette dernière catégorie, on doit encore distinguer les anti-vax systématiques et celles et ceux qui ont des inquiétudes par rapport aux vaccins existants contre le Covid. Vers la mi-juillet, on comptait encore 16% de Français/ses qui n’ont « pas l’intention de se faire vacciner ». Plutôt féminine, d’un âge inférieur à 35 ans, cette catégorie regroupe surtout des Français.es issu.es des catégories populaires[5].

Il y a de fortes raisons de penser qu’avec le passe sanitaire, et la volonté macroniste de forcer indirectement les non-vacciné.es à recevoir une injection ou à être privé.es de nombreuses activités sociales, d’encourir des sanctions professionnelles voire la perte de leur emploi, créant ainsi une véritable ségrégation sur une base en fait bien plus politique que sanitaire, le gouvernement va sans doute réussir à braquer bien davantage celles et ceux qui hésitaient à se faire vacciner. On voit défiler actuellement toute une population qui perçoit à juste titre que le pouvoir la méprise, et qui se révolte parce qu’elle sent sa dignité bafouée. Cette situation est propre à créer des solidarités entre celles et ceux qui manifestent ou qui affichent de la bienveillance à leur égard, et une partie au moins des personnes déjà vaccinées. On le constate d’ailleurs dans les manifestations actuelles.

Pourquoi la contrainte et l’autoritarisme, plutôt que la confiance et la pédagogie ?

Mais en réalité, le choix de la pédagogie et la conviction exigerait des conditions qui, bien loin d’être réunies, sont devenues impensables au cours du mandat d’Emmanuel Macron. Pour pouvoir fonctionner, cette démarche – et cela est vrai a fortiori dans les matières sensibles comme les questions de santé et le traitement des corps humains – doit être proposée par un pouvoir politique qui sait faire preuve de transparence, qui met un point d’honneur à dire la vérité même si elle est délicate, qui montre de la bienveillance et de l’empathie, et qui traite la population en adulte. En un mot, cette méthode exige un haut niveau de confiance de la population pour son gouvernement. Tout cela s’oppose point par point à ce qu’a été le pouvoir de Macron depuis le début. Pour nous en tenir à la seule crise sanitaire, rappelons brièvement les erreurs, et surtout l’incurie et les mensonges gouvernementaux que nous avons subis depuis le début 2020. Observons néanmoins que le coronavirus a frappé après un début de présidence Macron déjà marqué par deux mouvements sociaux majeurs : les Gilets jaunes à partir de novembre 2018, puis la lutte massive contre une nouvelle et brutale réforme des retraites en décembre 2019 et janvier 2020 ; une présidence aussi caractérisée par une injustice fiscale accrue, des attaques contre le droit du travail, ainsi que par les violences policières et la répression judiciaire face à la contestation.

Petite rétrospective de la gestion sanitaire macroniste

  • Dans un tout premier temps, de janvier à la mi-mars 2020, l’exécutif a totalement négligé les appels de plus en plus pressants de l’OMS, et notamment ses demandes aux Etats de vite mettre en place une stratégie du tester-tracer-isoler. Le pays ne s’est absolument pas préparé à affronter la pandémie, tandis que la ministre de la santé de l’époque, Agnès Buzyn, prétendait le 21 janvier que « notre système de santé est bien préparé», le 24 que « les risques de la propagation dans la population [française] sont très faibles », et le 26 que « Nous avons des dizaines de millions de masques en stock en cas d’épidémie, ce sont des choses qui sont d’ores et déjà programmées »[6]. Premier mensonge à propos des masques !
  • A cela est venu s’ajouter l’effet assez délétère de la démission de ladite ministre de la santé – dans un contexte très théâtral – laquelle a été chargée de remplacer comme candidate macroniste à la Mairie de Paris l’ex-porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, « plombé » par une vidéo intime très compromettante. Agnès Buzyn a ensuite raconté qu’elle avait compris le caractère très grave de l’épidémie partie de Wuhan et qu’elle en avait averti les autorités sanitaires et le premier ministre, notamment pour reporter les élections municipales, mais qu’elle n’a pas été écoutée…
  • Alors que déjà, l’épidémie frappait l’Europe – l’Italie tout particulièrement – et que d’autres pays avaient déjà commencé à se préparer à lutter contre l’épidémie, on voyait, le 6 mars, Macron et son épouse qui péroraient au théâtre. « La vie continue. Il n’y a aucune raison, mis à part pour les populations fragilisées, de modifier nos habitudes de sortie»[7], déclarait alors le président. A ce moment, alors que l’appareil étatique français était complètement désorganisé et pris de cours, on chargeait le directeur général de la santé de mentir sur plusieurs points. Ce dernier déclarait : « Les tests ont été disponibles très rapidement grâce à l’Institut Pasteur » ; et à propos des masques : « nous n’avons pas d’inquiétude sur ce plan. Il n’y a donc pas de pénurie à redouter, ce n’est pas un sujet ». Nouveau mensonge à propos des masques, on le saura bientôt. Et le 12 mars, l’exécutif prenait la décision contradictoire de confiner le pays tout en maintenant le premier tour des élections municipales le 15 mars. Des contaminations s’en sont suivies dans les bureaux de vote, faisant des victimes, notamment plusieurs maires.
  • Mars 2020 a été riche en contre-vérités et en cacophonie au sein du pouvoir. A propos des masques, en premier lieu. Sibeth Ndiaye, porte-parole du gouvernement, expliquait le 4 mars : « on ne doit pas acheter de masques» ! Le 25 mars, elle prétendait : « il n’y a pas besoin de masque quand on respecte la distance de protection vis-à-vis des autres »… ce qui n’empêchait pas Macron de visiter un hôpital de campagne avec un masque FFP2, le soir même[8]. Dans la même veine mensongère, c’est Castaner, à l’époque ministre de l’intérieur, qui affirmait le 19 mars que les policiers « ne sont pas en risque face au coronavirus »[9] et n’ont pas besoin de masques. Leur uniforme suffirait donc à les protéger ? Près d’un an et demi plus tard, ces boniments semblent encore plus grotesques. Cela alors même que des unités de police étaient déjà confinées. Tout cela pour cacher ce qu’un rapport parlementaire a révélé à la fin de ce fatidique mois de mars : le stock stratégique de masques était tombé à un niveau extrêmement bas, faute de renouvellement : plus que 100 millions à la fin 2019…
  • Le début de la pandémie en France a révélé le même type de baratin et de camouflage à propos des tests, leur utilité et conditions d’utilisation… là encore du fait d’une massive défaillance de l’appareil d’Etat, alors même que des laboratoires vétérinaires et autres, publics ou privés, pouvaient largement réaliser des tests et que le pouvoir laissait sans réponse ou bloquait toutes ces offres. Résultat : fin mars 2020, l’Allemagne procédait à 500 000 tests hebdomadaires, contre 80 000 en France[10]. Du coup, comment mettre en place une forte stratégie de dépistage, comme le réclamait l’OMS ? Ces défaillances stratégiques en cascade ont sans doute poussé à la mise en place d’un confinement très autoritaire – avec les attestations à remplir, et les contrôles policiers notamment –, un des plus stricts et des plus longs en Europe (1 mois et 25 jours).
  • Les mensonges ont de courtes jambes, dit un proverbe allemand. Effectivement, ils ne mènent en général pas loin, et conduisent facilement leurs auteurs à se contredire ou à être contredits par d’autres ou par les faits. C’est ce que l’on a rapidement pu constater à propos des masques ou des tests. Il est toutefois un mensonge du gouvernement dont les vilaines pattes se sont révélées plus longues que celles de la moyenne des bobards du pouvoir : c’est celui qui concerne le Covid-19 chez les enfants et l’école. Au début de l’épidémie, on ignorait précisément les phénomènes de contagiosité chez les enfants, d’où des doutes et des hésitations quant à l’ouverture ou la fermeture des établissements scolaires. Mais rapidement des études au niveau international ont révélé la contagiosité des enfants. Peu importe au gouvernement français, qui a longtemps prétendu le contraire, avant de taire la question tout en adoptant des mesures qui faisaient comme si la contagion dans les établissements scolaires n’était pas un problème. Jean-Michel Blanquer est une pièce maîtresse de l’attelage gouvernemental. En tant que ministre de l’éducation nationale, il a toujours agi au maximum dans l’intérêt de la classe capitaliste et au détriment des élèves, des familles et des personnels enseignants et non-enseignants. Son rôle, assumé avec zèle, a consisté à maintenir le plus possible ouverts les écoles, collèges et lycées pour accueillir les élèves et permettre aux parents de se rendre à leur travail et de continuer à produire la plus-value exigée par les capitalistes. Le crime est d’autant plus grand qu’aucun moyen conséquent n’a été mis en œuvre pour appliquer des protocoles sanitaires cohérents avec les études sur les modes de transmission de la Covid-19 ou les principes de précaution.

Le bon élève Blanquer s’est d’ailleurs d’emblée fait contredire, lorsqu’il a déclaré le 12 mars : « Nous n’avons jamais envisagé la fermeture totale des écoles »[11]. Le soir même, Macron annonçait le premier confinement avec la fermeture des écoles, collèges, lycées et universités ! Envoyer bosser les prolétaires, même sans protection, tel était aussi le rôle de Muriel Pénicaud, alors ministre du travail. Celle-ci s’indignait de l’arrêt des chantiers dans le bâtiment et les travaux publics et déclarait : « Arrêter d’aller bosser, arrêter de faire vos chantiers, ça c’est du défaitisme. Les entreprises qui ne jouent pas le jeu, qui se disent “l’État paiera”, ce n’est pas du civisme »[12], et elle menaçait alors de supprimer le chômage partiel dans de tels cas. Tout cela au moment même où les autorités sanitaires insistaient sur la nécessité de rester chez soi.

  • Mais le chaos, l’amateurisme, les tricheries et mystifications gouvernementales n’ont pas été la particularité de la seule première vague. Fin décembre 2020 et début janvier 2021, alors que les premiers vaccins étaient déjà parvenus en France, de nouveaux retards s’accumulaient par rapport à l’Allemagne ou à la Grande Bretagne. Dans l’hexagone, les injections se déroulaient à pas de tortue mais pour Olivier Véran, ministre de la santé, cette lenteur était un atout pour prendre « le temps de la pédagogie»[13] et éviter des erreurs. Cela alors que la troisième vague montrait le bout de son nez et que l’arrivée des variants inquiétait les scientifiques qui insistaient sur la nécessité d’avancer vite dans la vaccination. Parlant d’une « très importante erreur stratégique », le généticien Axel Kahn expliquait, en ce sens : « ça n’est pas en avançant à tout petit pas, qu’on arrivera à convaincre » les personnes pas forcément anti-vaccination mais « terriblement hésitants »[14]. Les doses de vaccin étaient là, à commencer par les produits Pfizer, mais elles sont restées largement inutilisées jusqu’en mars 2021, malgré l’argument fallacieux de l’insuffisance des doses livrées servi en boucle par le gouvernement, qui avait décidé de ne déployer les vaccins qu’à partir de mi-janvier… ce qui a conduit de fait à une accélération du rythme de vaccination seulement à partir de fin janvier.
  • Cafouillage toujours : Blanquer s’est à nouveau illustré en février 2021, en annonçant une forte campagne de 300 000 tests dans les établissements scolaires… Mais finalement son cabinait lui-même a dû rectifier : début mars, 3 000 tests seulement avaient été réalisés… faute de personnel[15].

A lui seul, ce rappel de quelques faits, qui ne prétend aucunement à l’exhaustivité, devrait suffire à mettre en lumière l’indécence de l’autosatisfaction dans laquelle baigne le discours du 12 juillet. Rappelons que l’OMS insistait sur la nécessité pour les gouvernements de créer la confiance, en jouant la transparence et l’humilité, et notamment de parler des doutes et des incertitudes : « Les messages diffusés par les autorités devraient inclure des informations explicites quant aux incertitudes associées aux risques, aux événements et aux interventions, et préciser ce que l’on sait et ce que l’on ignore à un instant donné »[16]. Tout le contraire de l’hyperprésidence de Macron.

Variant Delta, méfiance anti-vaccinale et scandales sanitaires à la française

Quelques semaines avant le discours du 12 juillet, non seulement le président, mais aussi le ministre de la santé, et des députés de la majorité présidentielle, tout le monde dans les sphères du pouvoir se disait opposé à une généralisation du passe sanitaire, et attaché au respect des libertés individuelles et notamment à la liberté vaccinale. Là encore, c’est un virage à 180 degrés qui est pris par l’exécutif. Et cela n’est sans doute pas pour rien dans la mobilisation montante de ces dernières semaines. Mais le gouvernement observe la montée d’une quatrième vague, qui se forme actuellement dans les stations balnéaires et les lieux de villégiature, après la réouverture complète des endroits tels que les boites de nuit, qui étaient restés fermés si longtemps. Le variant Delta frappe vite et fort, et cela a poussé l’exécutif à une nouvelle volte-face et à ses décisions brutales. Selon Mediapart, « le variant Delta du Sars-CoV-2, davantage contagieux, exige une couverture vaccinale de plus de 90 % pour limiter la circulation du virus ». Or nous en sommes loin en France, et l’exécutif sent bien qu’il ne parviendra pas à convaincre ces 90%. C’est d’ailleurs une affaire impossible en ne vaccinant pas les moins de 12 ans, qui sont aussi contagieux…

Car la vague de manifestations actuelle se déroule effectivement sur un fond de défiance vaccinale, mais celle-ci est largement due à la gestion catastrophique et mensongère de la crise sanitaire par le gouvernement. Comment, après toutes ces erreurs, tous ces bobards, Macron et son gouvernement pourraient-ils espérer obtenir la confiance nécessaire à une vaccination générale de la population ? L’exécutif est, de fait, devenu le pire ambassadeur de la vaccination. Rien que le fait que le pouvoir s’affirme en faveur de celle-ci conduit une partie de la population à se méfier, voire à la refuser ; et la volonté du sommet de l’Etat d’user de la répression et de la contrainte aggrave les choses

Cela est d’autant plus vrai que l’affaire se déroule dans un pays où l’existence de courants anti-vaccination est un phénomène durable, remontant aux débuts même de la vaccination, et aujourd’hui souvent en lien avec des mouvements d’extrême droite. Le rejet de la science et la méfiance vis-à-vis de la médecine a été renforcé en France par des scandales sanitaires à répétition survenus ces dernières décennies. Ils ne concernent pas la vaccination, mais la santé en général, particulièrement dans son cadre capitaliste, et surtout, la présence de divers laboratoires pharmaceutiques. Ces moments de douleur et d’opprobre pour la santé publique vont du talc Morhange tueur de bébés en 1972 au scandale très récent du Mediator, prescrit largement comme coupe-faim et fauteur de graves lésions cardiaques avec de nombreux décès, en passant par le Distilbène, hormone de synthèse prescrite de 1950 à 1977, et fauteuse de cancers vaginaux et utérins et de malformations fœtales ; par le scandale du sang contaminé (produits de transfusion sanguine non chauffés et infectés par le VIH) dans les années 1980 ; par l’hormone de croissance infectée par le prion de la maladie de Creutzfeld-Jacob, destructrice du système nerveux, et injectée à des enfants, dont 120 sont décédés ; par les prothèses mammaires de la société PIP fauteuses de cancer ; et à partir de 2015, par l’affaire de la Dépakine, épileptique de Sanofi ayant causé des malformations fœtales après des traitements pendant des grossesses[17]?

Le projet de loi adopté, à peine retouché par le parlement.

Le projet de loi annoncé par Macron le 12 juillet a été discuté au pas de gymnastique au parlement à partir du 21 juillet. Le parlement (le Sénat pour l’essentiel) a à peine pu assouplir le texte. Le texte commun à l’Assemblée et au Sénat a été voté le 26 (169 voix pour, 60 contre à l’Assemblée ; 195 voix pour, 129 contre au Sénat)[19]; et le conseil constitutionnel a globalement validé la démarche du pouvoir le 5 août. Dès le 9 août, le texte doit s’appliquer et entrer en vigueur jusqu’au 15 novembre. Il en résulte en particulier les points suivants.

Le passe sanitaire doit s’appliquer et la vaccination des soignant.es devient obligatoire. En intérieur comme en extérieur, les restaurants, bars, lieux d’activités sportives et de loisirs, salons professionnels, les établissements de santé, sociaux et médico-sociaux (sauf pour les urgences) devront contrôler le QR code de leurs clients – pour les mineurs à partir de 12 ans à partir du 30 septembre – et refuser les personnes ne disposant pas du passe sanitaire, le contrôle d’identité étant sous la responsabilité de la police.

La volonté répressive du gouvernement vis-à-vis des travailleurs/ses réfractaires à la vaccination dans les lieux où s’impose le passe sanitaire a été quelque peu limitée par les sénateurs : les salarié.es du privé en CDI et les fonctionnaires non vacciné.es au 30 août et refusant toujours de se faire vacciner ne seront pas licencié.es, mais leur contrat de travail sera suspendu, ainsi que leur salaire. Pour les CDD et les intérimaires, le licenciement reste inscrit dans la loi, moyennant des indemnités de fin de contrat. Une contre-indication au vaccin, sur avis médical, tiendra lieu de passe sanitaire, mais les motifs de contre-indications doivent être encadrés par la Haute Autorité de santé, et on sait que le ministre de la santé en a une définition très restrictive. Pour les personnels soignants, un léger sursis a été obtenu au Sénat : si une première dose de vaccin leur a été injectée, leur contrat de travail et leur salaire, ne pourront être suspendus qu’à partir du 15 octobre.

Attaque contre les salarié.es, nouvelles dispositions liberticides

Ce qui précède signifie clairement des attaques contre l’emploi des salarié.es. Pour les CDI et les fonctionnaires, la loi ne va donc finalement pas (contrairement à ce que souhaitait le gouvernement) jusqu’à créer de nouvelles autorisations de licenciement (notamment dans la fonction publique hospitalière) mais, avec la création de cette obligation vaccinale de fait, les salarié.es de nombreuses branches du public et du privé sont agressé.es par les suspensions de contrats et de salaires (pour les CDI et les fonctionnaires) et par les licenciements (pour les CDD et les intérimaires). En dehors de la santé, c’est vrai aussi pour le commerce, le secteur touristique (restauration, hôtellerie, parcs d’attractions, etc.), pour le sport et les loisirs… C’est donc une attaque contre notre classe, qu’il faut repousser. Face à cela, les directions syndicales sont restées particulièrement somnolentes, ne prévoyant pour l’instant qu’une journée d’action… le 5 octobre. Une fois de plus, les bureaucrates naufrageurs de la classe prolétarienne sont dans le mépris de celle-ci et dans l’absence et la trahison. Toutefois, quelques unions départementales ou locales ont réagi, et appelé à participer aux manifestations. Les militant.es du mouvement ouvrier organisé sont pourtant bien peu nombreux/ses dans ces mobilisations.

De plus, la nouvelle loi trouve sa place dans toute une panoplie de mesures liberticides, autoritaires, prises par Macron et son gouvernement. Avec le passe sanitaire, on va assister à la généralisation des contrôles d’identité, tous les jours. Cela est pénible, et même exaspérant pour tout un.e chacun.e. Mais si l’on pense à toute une série de personnes particulièrement vulnérables, cela veut dire des difficultés de vie accrue et une angoisse permanente. Que l’on songe aux personnes transgenres, ou encore aux sans-papiers ! Il est fort probable qu’une grande partie de ces catégories les plus fragiles seront conduites à une marginalisation accrue, notamment en évitant les lieux où le passe sanitaire sera exigé.

Participer aux manifestations, ou pas ?

Ce qu’on appelle la gauche en France (qui va de la « gauche » bourgeoise style PS à l’extrême gauche) est divisée sur l’attitude à adopter face aux manifestations qui se multiplient et se renforcent de semaine en semaine. Même parmi les militant.es d’extrême gauche, la gêne est souvent au rendez-vous, qui en conduit beaucoup à se tenir à l’écart de ce mouvement.

Il est vrai que ce mouvement met en scène des gens peu recommandables. L’extrême droite y est présente, avec ses identitaires, ses « Patriotes », ses complotistes. Elle cache ses sombres projets politiques derrière le vocable affriolant de « liberté ». Elle voudrait faire oublier que les deux pays qui subissent les pires effets de la pandémie (en termes de nombre de morts), payent la politique de présidents qui se trouvent de ce côté de l’échiquier politique : Trump, et Bolsonaro. Les délires anti-vaccination les plus divers ont également cours dans ces manifs. Et c’est tout cela qui retient d’y intervenir une fraction du monde militant habitué aux luttes sociales plus classiques, comme sur les salaires, l’emploi, etc. Pourtant, se tenir à l’écart de cette vague de manifs est une erreur. Et cela pour au moins quatre raisons.

En premier lieu, parce que l’extrême droite n’y est pas dominante. Même si elle est présente dans beaucoup d’endroits (pas tous), elle est encore plus loin d’y être à l’initiative partout. Très souvent, les manifs ne font apparaitre aucune organisation politique. Souvent, la mobilisation a été lancée par des groupes locaux de Gilets jaunes. Parfois par des militant.es syndicaux, voire politiques. On a également vu qu’à Paris, très vite, des courants proches des Gilets jaunes ont disputé le contrôle du mouvement à Florian Philippot et à ses « Patriotes », ou à Nicolas Dupont-Aignan. On peut aussi observer que le 7 août, la manif marseillaise s’est arrêtée devant l’immeuble de Zineb Redouane, une Algérienne de 80 ans tuée gratuitement à sa fenêtre par un policier en marge d’une manifestation des Gilets jaunes ; et le cortège a fait une minute de silence. Cela ne caractérise pas vraiment une manif d’extrême droite non plus…

En second lieu, parce que les courants réactionnaires et obscurantistes jouent sur les peurs – notamment celles liées à la science et à la santé – et ne sont pas en mesure d’apporter des réponses satisfaisantes aux attaques du gouvernement et aux angoisses d’une partie – souvent la plus opprimée – de la population en lien avec la situation sanitaire et ses conséquences sociales. Cela ne deviendra que plus évident si un débat public s’amorce dans le contexte de ces mobilisations, et ce n’est pas en tournant les talons que les militant.es qui défendent les positions rationalistes de la tradition ouvrière pourront vaincre les délires et les préjugés réactionnaires et obscurantistes. En fait, l’écrasante majorité des manifestant.es est à la fois très hétérogène et très vierge politiquement. Laisser les fachos et les anti-vax à la manœuvre dans cette mobilisation croissante, c’est déserter un terrain social qui peut s’avérer très explosif, et c’est, une fois de plus, faire la démonstration que les organisations qui se réclament du mouvement ouvrier sont inutiles et absentes quand on pourrait avoir besoin d’elles. C’est aussi donner des cartes maîtresses aux courants réactionnaires et fascistes pour la période qui vient, et aussi pour les prochaines élections présidentielles.

En troisième lieu, il est indispensable, face aux attaques sociales répétées et de nouveau annoncées par Macron (indemnisation du chômage, retraites) de ne pas laisser notre classe divisée par une nouvelle fracture : les vacciné.es d’un côté, les non-vacciné.es de l’autre. Pour notre part, nous sommes radicalement pour la vaccination la plus rapide, la plus complète et la plus internationale possible, mais pour pouvoir en convaincre nos entourages, encore faut-il savoir s’adresser à celles et ceux qui redoutent ces vaccins ou la vaccination en général. Dans les entreprises et les bureaux, une solidarité concrète doit se développer entre vacciné.es et non-vacciné.es, en particulier pour refuser les sanctions professionnelles. Et cela passe par de vastes discussions, et par une participation en commun à la mobilisation en cours. Il est aussi de notre devoir, en tant que militant.es de l’émancipation des travailleurs/ses de ne pas laisser seul.es face à la discrimination des catégories aussi vulnérables que celles mentionnées plus haut (transgenres, sans-papiers…).

La quatrième raison qui milite pour une participation de l’extrême gauche et de la gauche militante à ces mobilisations, c’est qu’il s’agit d’un phénomène massif, et inédit : des défilés d’une taille croissante, en pleine période de grandes vacances, et qui font descendre dans la rue des personnes n’ayant pas ou très peu d’expérience politique et syndicale. C’est là la preuve qu’il se passe quelque chose d’important. Il est logique que lorsque de larges secteurs populaires se mobilisent pour la première fois, des confusions et des idées fausses s’expriment. C’est dans le cours de la mobilisation qu’elles peuvent disparaître, avec les débats et l’expérience qui peuvent alors s’accumuler. Ne laissons pas commettre pas la même erreur que lors de l’émergence des Gilets jaunes, où la plus grande partie du mouvement ouvrier – à commencer par les directions syndicales majoritaires, particulièrement odieuses et méprisantes pour le mouvement social naissant –, et une large part de l’extrême gauche avait mal compris le mouvement, considéré d’emblée comme téléguidé par l’extrême droite et la droite extrême. Même si, par la suite, des rapprochements partiels ont eu lieu entre certains secteurs du mouvement ouvrier et Gilets jaunes, la coupure initiale a laissé une vilaine balafre sur le visage politique et syndicale des classes populaires en France. Aujourd’hui, les directions syndicales traitres considèrent à nouveau l’opposition populaire à Macron avec condescendance et la laissent se débrouiller avec l’extrême droite et les complotistes. Cette politique est véritablement catastrophique. D’un autre côté, les groupes locaux de Gilets jaunes encore actifs sont souvent à l’initiative dans cette mobilisation. Cela devrait être l’occasion de tisser de nouveaux liens militants.

Que défendre dans les mobilisations ?

Ce qui ressort de toutes les manifestations, c’est que le rejet du passe sanitaire constitue l’axe central, le point de ralliement des manifestant.es. L’exigence d’abrogation de la nouvelle loi – injuste, inégalitaire, ségrégative et largement inefficace pour la santé publique – est donc le premier pilier d’une politique révolutionnaire dans ces mobilisations.

Dans celles-ci, on entend partout : « Macron démission ». Il faut reprendre ce mot d’ordre. Il est juste. Macron est le président des ultra-riches, et il a déjà fait bien trop de dégâts. Même s’il y a un moins seulement, tout semblait calme, il est sain qu’à nouveau les masses populaires exigent son départ. Par son style comme par ses choix d’orientation, le freluquet de l’Elysée canalise la rage et la haine des classes populaires. L’injustice de sa politique, son arrogance, son mépris de classe presque assumé et son autoritarisme ont creusé un profond fossé entre lui, son gouvernement, son parti de godillots, d’une part ; et la grande masse des travailleurs et des travailleuses, de l’autre. Même si les manifestations actuelles sont plus interclassistes, moins prolétariennes que celles des Gilets jaunes, Macron – plus qu’aucun président de la Ve République avant lui – est extrêmement clivant et il rend encore plus visible la fracture de classes qui déchire le corps social. A une échelle de masse, il n’apparait pas d’alternative politique crédible à Macron à ce stade, mais une chose est sûre : Macron et sa clique sont devenus un point bloquant non seulement sur le plan démocratique, mais pour pouvoir sortir de la crise sanitaire elle-même. De notre point de vue, une vaccination rapide et complète de l’ensemble de la population est nécessaire, mais pour l’expliquer et convaincre, Macron et sa bande semble complètement grillés.

La question de la liberté vaccinale et les inquiétudes à propos des vaccins

Macron est clivant socialement, au point que parmi celles et ceux d’en-bas, il s’est sans doute développé une tendance à croire systématiquement le contraire de ce qu’il dit… même s’il lui arrive, ponctuellement, de dire des choses vraies ! Pour certain.es, puisque Macron prône la vaccination, et veut maintenant l’imposer, il faut s’en méfier et la refuser… C’est d’ailleurs un phénomène qui complique notre tâche. Quelle attitude adopter sur ce point ? Bien sûr, les anti-vax défendent des positions réactionnaires, obscurantistes et dangereuses. Bien sûr, les complotistes inventent des histoires abracadabrantesques qui nous éloignent d’une compréhension sérieuse et cohérente du monde en crise dans lequel nous nous débattons. Mais que dire de celles et ceux qui défendent « la liberté de choix » pour la vaccination ? Ils et elles sont très nombreux/ses dans les cortèges. Un certain nombre d’ailleurs sont vacciné.es. Ce n’est pas pour autant que cette position est juste. En évitant d’avoir recours à des arguments moralistes, il faut expliquer que pour être efficace, la vaccination doit être très massive et rapide[20]. Sans quoi la protection collective ne joue pas. Au contraire, la vaccination partielle exerce une pression sélective sur le virus, favorisant l’émergence de nouveaux variants, plus agressifs et résistants. C’est d’ailleurs pourquoi il faut exiger la suppression des brevets sur les vaccins, leur livraison massive et rapide dans le monde entier, en particulier dans les pays pauvres où la population attend d’être vaccinée, et lutter pour l’expropriation des laboratoires pharmaceutiques sous gestion des travailleurs/ses et de la collectivité.

La position en faveur du libre choix d’être vacciné.e ou non ne tient pas la route. Bien que beaucoup de personnes qui défendent de bonne foi cette position l’ignorent, la « liberté vaccinale » favorise la contamination, qu’on le veuille ou non. Laissons ici de côté les égoïstes qui se moquent de transmettre le virus, et réclament au nom de leur propre « liberté » la possibilité de contaminer autrui. L’immense majorité des manifestant.es, soyons-en sûr, n’appartiennent pas à cette catégorie. Dans les débats collectifs ou dans les discussions individuelles, il faut s’atteler à désamorcer les craintes qui existent face aux vaccins en général, et à ceux contre le Covid-19 en particulier. Beaucoup d’idées fausses circulent à ce sujet. Les sphères complotistes et anti-vaccination ne sont jamais à court d’idées farfelues et mystificatrices, qui se répandent rapidement via les réseaux sociaux. Sans s’étendre sur les délires d’un Jair Bolsonaro qui a jugé humoristique d’évoquer le risque pour une personne vaccinée de se transformer en crocodile, de vastes bobards circulent sur Internet et contribuent à faire grandir le doute et l’inquiétude.

Parmi les fables à dénoncer, on trouve notamment une légende à propos du vaccin contre l’hépatite B qui aurait provoqué des sclérose en plaques, une affaire née d’une étude bidon réalisée sur 13 patients, puis retirée car irrecevable. Sur le thème global des dangers de la vaccination, une étude du Haut conseil pour la santé publique publiée en 2010 – donc 10 ans avant la pandémie actuelle – relevait qu’il n’y avait jamais eu de problème à long terme avec des vaccins en tant que tels[21]. Il faut aussi expliquer les bienfaits de la vaccination face à des maladies contagieuses aujourd’hui presque oubliées : la variole, la poliomyélite, pour beaucoup la fièvre jaune… Les générations relativement jeunes n’ont pas eu à affronter ces horribles maladies, et du coup l’utilité des vaccins qu’elles ont déjà reçus n’apparaît plus concrètement. C’est tout le paradoxe de cette mesure préventive qu’est l’immunisation vaccinale : lorsque cela fonctionne…il ne se passe rien ; tout le contraire d’une thérapie qui permet de guérir.

Quant aux vaccins anti-Covid disponibles actuellement, il est exact que les délais habituels ont été nettement raccourcis, mais cela s’est fait par chevauchement des phases de développement, de tests et d’homologation, vu l’urgence sanitaire internationale. Il faut aussi comprendre une chose simple : quel intérêt auraient Pfizer, Moderna, Astra Zeneca ou d’autres producteurs de vaccin à produire des substances dangereuses ? Il est vrai que le recul est encore limité, mais il faut saisir que ces laboratoires sont des entreprises capitalistes dont l’intérêt est la maximisation du profit pour leurs actionnaires. Ce n’est pas en tuant des gens – ce qui ferait tôt ou tard écrouler le cours de leurs actions – mais en les protégeant efficacement qu’elles peuvent maximiser leurs profits. C’est d’ailleurs l’efficacité de leurs produits qui permet à Pfizer et à Moderna d’augmenter leurs prix aujourd’hui, alors que ce sont des finances publiques qui ont très largement financé ces entreprises. Le vrai scandale se situe à ce niveau, et dans le fait que ces monstres capitalistes détiennent des brevets qui limitent drastiquement l’accès au vaccin dans de nombreux pays. Ces pays fonctionnent, par conséquent, comme des bouillons de culture, potentiels ou réels, favorisant l’émergence de nouveaux variants qui affecteront leur population et toucheront tôt ou tard les autres pays.

On entend des opposant.es à la politique sanitaire de Macron qui font observer, à juste titre, qu’en étant vacciné.e on peut quand même transmettre le virus. C’est exact. Mais c’est aussi une question de probabilité. Une personne vaccinée risque beaucoup moins de contaminer les autres et risque bien moins d’être affectée par une forme grave de Covid. Selon Daniel Lelièvre, chef du service d’immunologie clinique et maladies infectieuses au CHU Henri-Mondor de Créteil, « le risque de transmettre le virus pour les vaccinés n’est pas nul mais bien moindre. Ce n’est pas blanc ou noir. Chez les personnes vaccinées infectées, il y a une diminution de la concentration et de la durée de sécrétion des virus, ce qui limite les risques de contagiosité »[22]. Et la vague montante actuelle de contaminations avec le variant Delta semble bien indiquer que les vaccins actuels tiennent bon face aux dernières mutations du virus. Les non vacciné.es, par contre, sont plus durement touché.es par la nouvelle vague ascendante. Le professeur Nicolas Bruder, chef du service de réanimation de l’hôpital de la Timone, à Marseille, explique dans Mediapart le 29 juillet : « On voit les malades du Covid revenir, alors qu’ils avaient quasiment disparu. C’est en train de remonter très vite […] On a déjà 50 patients en hospitalisation conventionnelle, les services sont sous tension. En réanimation, on commence à être sollicités, alors qu’on n’a déjà plus aucune place »[23]. Il ajoute, à propos de l’efficacité des vaccins : « nous n’avons que des non-vaccinés. Depuis le début de l’épidémie, nous avons admis 700 malades du Covid en réanimation, deux étaient vaccinés, mais avec une seule injection. Ils ont été admis dans la semaine suivant leur vaccination »[24]. Le variant Delta envoie en réanimation, dit-il, « des malades souvent entre 40 et 60 ans » : « Certains n’ont aucune pathologie, ils sont parfois en surpoids, mais ce n’est pas systématique. On a actuellement un patient de 40 ans, qui n’avait aucun facteur de risque, sous oxygénation par membrane extracorporelle [une assistance à la fois cardiaque et respiratoire utilisée en dernier recours – ndlr Mediapart], il risque de mourir. Notre plus jeune patient avait 18 ans. Tous disent regretter de ne pas s’être fait vacciner »[25].

Elargir le champ de la contestation

Certes, les manifestations actuelles se prêtent mal à un plaidoyer virulent pour la vaccination. C’est pourquoi, tout en défendant la vaccination dans son principe, il faut la présenter comme un droit auquel tous et toutes doivent pouvoir accéder, en France et dans le monde. C’est aussi la raison pour laquelle, notamment, la question de la suppression des brevets doit être mise en avant. Il faut insister sur le fait qu’en France – mais c’est vrai dans beaucoup de pays – l’austérité capitaliste a fait considérablement régresser le service public de santé, et sa capacité de réaction face à la pandémie. Il faut aussi rappeler que malgré cette dernière, les suppressions de lits d’hôpitaux continuent. Face à ce scandale, il faut opposer l’exigence d’un service public de la santé non soumis à l’impératif du profit, qui inclue notamment une collectivisation des laboratoires pharmaceutiques. Une grande partie des manifestant.es peut comprendre et s’approprier ces thématiques.

La question générale de la solidarité avec les personnels soignants et avec les travailleurs/ses attaqué.es par cette loi se pose aussi et semble obtenir beaucoup de répondant. Enfin, il ne faut pas oublier que Macron, dans le même discours, a annoncé deux très mauvaises nouvelles pour les travailleurs/ses : une pour le 1er octobre, qui signifie une baisse de l’indemnisation du chômage qui va laisser de nombreux précaires dans une situation catastrophique ; l’autre, à en croire Macron, pour le moment où la pandémie sera sous contrôle – on ne peut guère faire de pronostic sur la date en question, mais on peut aussi craindre qu’il accélère le processus s’il le juge utile – à propos de la funeste réforme des retraites qu’il n’a pas encore réussi à imposer. C’est le même Macron qui impose une nouvelle loi liberticide et scélérate, et qui confirme qu’il donnera aux travailleurs/ses les coups féroces qu’il n’a pas encore pu concrétiser. Ces approches sont mises en avant çà et là par des groupes militants, notamment à Brest par un groupe de Gilets jaunes[26]. Il faut s’efforcer de leur donner plus d’écho.

C’est peut-être une nouvelle grande bataille sociale qui a démarré à la mi-juillet. Il faut s’efforcer d’agir pour éviter les écueils de l’extrême-droite, des complotistes et des anti-vax, et mobiliser au contraire toutes les thématiques qui iront dans le sens de l’unité et de la lutte de notre classe.

NON :

*AU PASS SANITAIRE

*AUX SUSPENSIONS DE CONTRATS DE TRAVAIL ET DE SALAIRES

*A LA CASSE DU DROIT DU TRAVAIL

*A L’ETAT D’URGENCE, AUX LOIS LIBERTICIDES, A LA REPRESSION

* AUX « REFORMES » MACRON CONTRE LES RETRAITES ET L’INDEMNISATION DU CHÔMAGE

OUI :

*A LA LEVEE DES BREVETS ET A LA COLLECTIVISATION DES LABORATOIRES

*A L’ACCES AUX VACCINS PARTOUT DANS LE MONDE

*A LA VACCINATION SUR LE TEMPS DE TRAVAIL

*DES MOYENS POUR L’HOPITAL PUBLIC ET LES SERVICES DE SECOURS

[1] https://www.mediapart.fr/journal/france/170721/plus-de-100-000-manifestants-en-france-la-galaxie-des-opposants-au-passe-sanitaire-s-etend?utm_source=20210717&utm_medium=email&utm_campaign=QUOTIDIENNE&utm_content=&utm_term=&xtor=EREC-83-[QUOTIDIENNE]-20210717&M_BT=1976669439438

[2] « Les gens qui réussissent et les gens qui ne sont rien » : petite phrase d’Emmanuel Macron 29 juin 2017 (donc au tout début de son quinquennat), lors d’un discours dans le cadre d’une inauguration à Paris.

[3] https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/06/18/le-lourd-cout-humain-d-un-troisieme-confinement-tardif-en-france_6084619_3244.html

[4] https://www.capital.fr/economie-politique/lallemagne-soppose-a-la-vaccination-obligatoire-affirme-angela-merkel-1409298

[5] https://www.lesechos.fr/economie-france/social/covid-ces-16-de-francais-qui-ne-veulent-pas-des-vaccins-1334302

[6] https://www.mediapart.fr/studio/panoramique/une-annee-de-covid-19-les-sept-erreurs-du-pouvoir

[7] Idem.

[8] Idem.

[9] Idem.

[10] Idem.

[11] Idem.

[12] Idem.

[13] https://www.lesechos.fr/politique-societe/politique/covid-19-la-strategie-de-vaccination-du-gouvernement-fait-polemique-1277200

[14] Idem.

[15] https://www.mediapart.fr/studio/panoramique/une-annee-de-covid-19-les-sept-erreurs-du-pouvoir

[16] Idem.

[17] https://www.lesechos.fr/politique-societe/societe/mediator-distilbene-sang-contamine-ces-scandales-sanitaires-qui-ont-marque-la-france-1133993

[18] https://www.lesechos.fr/industrie-services/pharmacie-sante/covid-pfizer-et-moderna-augmentent-le-prix-de-leurs-vaccins-en-europe-1336262

[19] https://www.mediapart.fr/journal/france/260721/passe-sanitaire-la-loi-est-adoptee-peine-assouplie?onglet=full

[20] Tout en étant conjuguée à une circulation virale la plus faible possible et en faisant l’objet de mesures préventives aux frontières. Mais ça, ce n’est pas bon pour le business…

[21] https://www.hcsp.fr/Explore.cgi/Telecharger?NomFichier=ad713740.pdf

[22] https://www.mediapart.fr/journal/france/200721/vaccin-obligatoire-ou-passe-sanitaire-xxl-la-recherche-du-moindre-mal?onglet=full

[23] https://www.mediapart.fr/journal/international/290721/face-au-variant-delta-la-france-n-pas-assez-vaccine-les-plus-fragiles?onglet=full

[24] Idem.

[25] Idem.

[26] https://tendanceclaire.org/breve.php?id=39254

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