Ce n’est une nouvelle pour personne que les médias ont mené une campagne politique colossale pour coincer et épuiser Castillo[1].
Par Víctor Montes, le 24 août 2021
Pour leur part, des secteurs de la droite politique, qui incluent le fujimorisme[2], l’aprisme [3], des ex-toledistes[4] et le PPC[5], continuent de mener des mobilisations exigeant la vacance présidentielle ouvrant la voie pour que des groupes de choc, tels que la soi-disant « insurrection » et la « Société des patriotes » fasciste, apparaissent au grand jour.
Le dernier épisode en date a conduit à la démission du ministre des affaires étrangères, acculé par la Marine et les médias en raison de ses déclarations accusant la marine d’avoir encouragé des attentats terroristes contre les navires cubains sous le gouvernement Velasco.
Comment Castillo « affronte » cette offensive ?
Comme le montre la démission de Béjar, abandonné à son sort par le conseil des ministres, le gouvernement est prêt à céder au « l’intimidation » des employeurs, de leurs partis et de leurs médias. Son objectif : les « rassurer » en montrant sa bonne volonté en échange de son maintien au gouvernement.
C’est pourquoi il a assuré la présence de Francke dans le MEF[6]. Francke, connu pour être issu de la « gauche », est devenu le principal garant de la continuité du plan économique. C’est pourquoi c’est lui qui s’est chargé de discuter avec les milieux d’affaires – avant la proclamation de Castillo – puis d’assurer la continuité de Velarde, l’homme fort des milieux d’affaires au sein du BCRP [7]et exigence non négociable des employeurs.
Les directions se sont mises au service de cette politique d' »apaisement ».
D’autre part, la direction de la CGTP[8] et les partis de gauche qui soutiennent le gouvernement (PC-Unidad, Patria Roja, Nuevo Perú…)[9], ainsi que les secteurs liés à l’ancienne CONARE-SUTEP [10], qui dirigent aujourd’hui la FENATEP[11] récemment reconnue, suivent cette même ligne et évitent de diriger la mobilisation ouvrière et populaire. Ceci malgré l’absence de solutions aux revendications des ouvriers, des enseignants et du peuple, et malgré le fait que le coût de la vie augmente, frappant l’économie populaire.
Les patrons en veulent plus
Mais cette politique s’est déjà révélée absolument impuissante face aux prétentions des patrons. Plus ceux-ci obtiennent de Castillo, plus ils en demandent. Le départ de Béjar démontre en pratique que Castillo peut accepter de modifier le cabinet Bellido. Un fait qui ne fait qu’enhardir les patrons, la droite et ses médias.
L’histoire, en revanche, montre que pour vaincre les patrons, qui défendent leurs intérêts à coups de bâtons et de sermons, le gouvernement doit adopter des mesures qui affaiblissent leur pouvoir économique, qui est ce qui leur permet d’imposer leur volonté politique.
Nous devons descendre dans la rue et exiger de Castillo qu’il prenne des mesures contre la hausse des prix des aliments (augmentation générale et contrôle des prix), qu’il récupère nos ressources naturelles, qu’il interdise les licenciements, les licenciements collectifs et la « suspension parfaite » [12], et qu’il convoque immédiatement une Assemblée constituante pour récupérer la souveraineté du pays.
Nous devons exiger de Castillo qu’il jette hors du gouvernement les agents des patrons, à commencer par Velarde et tous les gardiens du modèle néolibéral qu’ils ont placés au MEF, Produce (Ministère de la Production. NdT), au ministère de l’Énergie et des Mines, etc.
Ce n’est qu’en obtenant ces revendications que nous pourrons affaiblir et vaincre la classe capitaliste, et ouvrir la voie au pouvoir de la classe ouvrière et du peuple avec un véritable gouvernement de leurs organisations. En dehors de ces mesures, qui doivent être les premières pour affronter les patrons et la « droite », tout ce que dit le gouvernement n’est que du verbiage.
LE FASCISME DOIT ÊTRE ÉCRASÉ
L’apparition d’organisations d’ultra-droite qui utilisent des méthodes violentes pour attaquer les secteurs ouvriers et populaires,impose aux travailleurs la nécessité de discuter de notre auto-défense. Nous ne pouvons pas attendre de devenir des victimes de leurs agissements. Surtout quand le gouvernement leur permet de se développer sans rien faire.
Nous ne devons pas douter que, avant qu’ils ne prennent de la force, ces mouvements doivent être écrasés. C’est pourquoi nous devons être prêts à exercer notre droit de nous défendre contre leurs attaques. Et si nécessaire, de les vaincre en action.
Cependant, il est essentiel que nous exigions également que le gouvernement les réprime sans pitié : le gouvernement Castillo doit interdire « La Insurgencia », « Los Combattientes » et la « Sociedad Patriotas del Perú » ! Il doit arrêter et poursuivre les auteurs d’actions violentes contre les organismes publics et les fonctionnaires en poste, ainsi que leurs dirigeants ! Nous devons nous rappeler qu’on ne discute pas avec le fascisme… il doit être combattu et écrasé !
[1] Nouveau président du Pérou, enseignant d’origine paysanne, catholique conservateur. NdT
[2] Secteur en lien avec l’ex-président Alberto Fujimori (1990-2000), et dont la fille Keiko Fujimori était candidate à la dernière élection présidentielle, battue de peu par Pedro Castillo. NdT
[3] Vient de l’APRA, Alliance populaire révolutionnaire américaine, fondée dans les années 1920. NdT
[4] partisans de l’ex-président Alejandro Toledo (2001-2006). NdT
[5] Parti populaire chrétien, fondé en 1966, suite à des différents idéologiques avec la Démocratie chrétienne. NdT
[6] Ministère de l’économie et finances. NdT
[7] Banque Centrale de la Rpublique du Péru. NdT
[8]Confédération générale des travailleurs du Pérou, première centrale syndicale du pays. NdT
[9] Le Parti communiste péruvien, fondé en 1928, a scissionné en 1964 entre pro-Moscou (PC-Unidad) et pro-chinois (PC-Bandera Roja); Patria Roja est issu d’une rupture au sein du PC-Bandera Roja en 1970; Nuevo Perú est un mouvement politique de centre-gauche. NdT
[10]Ancien syndicat unique des travailleurs de l’Education. NdT
[11] Fédération nationale des travailleurs de l’Education. NdT
[12] Suspension temporaire du contrat de travail, sans rémunération. NdT