La victoire sur le nazisme lors de la Seconde Guerre mondiale est depuis longtemps devenue le mythe central de l’idéologie d’État de l’impérialisme russe.
Le Kremlin a transformé cette guerre en une croisade sacrée, l’utilisant cyniquement pour justifier une nouvelle agression criminelle – qui est bien sûr à l’opposé de la lutte antifasciste.
Demian Vinnichenko
9 mai 2025i
Après l’attaque nazie de 1941, la guerre des peuples de l’URSS est devenue la juste lutte d’un État ouvrier – bien que dégénéré par la bureaucratie stalinienne – contre l’agresseur fasciste. En particulier, la résistance des Ukrainiens qui ont rejoint massivement l’armée, organisé un mouvement partisan et défendu Kiev, Odessa et Kharkiv est devenue un facteur important dans la défaite ultérieure du nazisme. D’autres peuples ont également apporté une contribution colossale : les Biélorusses, les Arméniens, les Géorgiens, les Hébreux, les Tatars, les Ouzbeks, les Kazakhs, les Tchétchènes et bien d’autres encore…
Cependant, Poutine garde le silence à ce sujet, essayant jusqu’à aujourd’hui d’usurper la victoire des autres nations opprimées.
De plus, il cache que l’expansion nazie a commencé avec le « pacte Staline-Hitler » sur le partage de la Pologne en 1939, pacte qui ambitionnaitde partager l’Europe entre deux dictateurs.
Le régime policier de Poutine est le nouveau pilier contre-révolutionnaire de l’impérialisme mondial, raison pour laquelle Trump tente – de toutes ses forces et sans résultat jusqu’à présent – de parvenir à un accord avec lui.
Derrière la rhétorique « antinazie » de Poutine se cachent des tendances ultra-réactionnaires : le culte de l’autocrate, le capitalisme oligarchique, l’idéologie chauvine grand-russe et l’obscurantisme médiéval de l’Église orthodoxe russe.
Le dictateur russe promeut activement la même idéologie chauvine que Lénine critiquait durement. C’est pourquoi Poutine déteste profondément Lénine, l’accusant d’avoir « mis une bombe sous la Russie » et d’avoir « créé l’Ukraine ».
En annonçant le début de l’« opération militaire spéciale » (SVO), Poutine a déclaré que son objectif était la « dénazification » de l’Ukraine. Les médias russes répètent le mantra des « nazis » à Kiev, présentant l’Ukraine comme un « État fasciste », mais cette rhétorique maladroite ne résiste pas à la moindre critique. Le régime ukrainien est une démocratie bourgeoise, où l’extrême droite a été battue aux élections de 2019, et où Volodymyr Zelensky, d’origine juive et russophone, a été élu président.
De plus, avec sa « dénazification », Poutine n’a fait que renforcer la position de l’extrême droite ukrainienne qui, en pleine guerre, a acquis une nouvelle « légitimité » en tant que principal fantôme de la propagande de Poutine, et a finalement émergé de sa position marginale.
Le défilé annuel de la Journée de la Victoire en Russie ressemble de plus en plus à un spectacle grotesque qui a perdu tout lien avec l’expérience tragique de la guerre de libération contre le nazisme. De rituel de deuil, il est devenu une exhibition d’armes impériales. Ce défilé n’en appelle pas à la mémoire, mais à l’obéissance, à la disposition à mourir pour des objectifs impérialistes, au son des marches, des fanfares et des célébrations de la propagande télévisée. Il ne s’agit pas d’histoire, mais de sa falsification au service d’une guerre de conquête .
Le véritable combat antifasciste se livre aujourd’hui en Ukraine, non pas dans les rangs d’un défilé, mais dans les tranchées, les villes détruites, les brigades de volontaires et les réunions syndicales des travailleurs. C’est la classe ouvrière qui constitue la base de la résistance. Rappelons que l’antifascisme, depuis ses débuts, est apparu en réponse aux tentatives du capital de réprimer les aspirations émancipatrices des travailleurs.
Même en Allemagne, la résistance antinazie, bien que brutalement réprimée, comprenait des travailleurs, des cercles clandestins d’intellectuels et d’officiers antifascistes qui ont risqué leur vie pour saboter la machine de guerre du Troisième Reich.
Nous ne pouvons ignorer les mouvements partisans similaires dans la Russie actuelle et dans les territoires occupés de l’Ukraine, où des voies ferrées sont sabotées, des bureaux d’enregistrement et d’enrôlement militaire incendiés, des tracts distribués et des murs peints contre la guerre et l’invasion, malgré la torture et les longues peines d’emprisonnement.
Face à ces événements, la solidarité internationale des travailleurs avec l’Ukraine se renforce. Des travailleurs de différents pays expriment leur soutien à l’Ukraine : les dockers européens et étasuniens ont refusé de décharger des navires russes transportant du matériel militaire ; les syndicats organisent l’aide humanitaire ; et des déclarations condamnant sans réserve l’agression de Poutine sont entendues lors de conférences et de forums. L’exemple des travailleurs portuaires est particulièrement éloquent : « Des travailleurs du monde entier s’opposent fermement à l’invasion russe, y compris des milliers de dockers qui manifestent leur solidarité avec le peuple ukrainien et leur mépris pour l’agression de Poutine. »
Il est aujourd’hui évident que les véritables héritiers de la lutte antifasciste ne sont pas les dirigeants cyniques du Kremlin – qui arborent le drapeau de la victoire tout en commettant des agressions – ni l’administration Trump aux États-Unis, mais les gens ordinaires qui résistent à la violence et aux dictatures.
Leurs actions s’inscrivent dans la continuité directe de l’engagement de ceux qui, il y a 80 ans, ont défié le fléau nazi !
Outre leur opposition à l’agression de Poutine, les forces progressistes doivent également s’opposer à la montée du néofascisme et du populisme de droite en Europe, qui, soit dit en passant, sympathisent beaucoup avec le régime de Poutine. Il est également nécessaire de lutter contre le réarmement intense des pays de l’Otan, qui ne cherchent pas à « aider l’Ukraine », comme ils le prétendent hypocritement, mais à encourager le chauvinisme dans leurs propres rangs.
On ne peut pas vaincre une forme d’oppression impérialiste en en tolérant une autre. C’est pourquoi un véritable antifasciste, et en particulier un socialiste, s’opposera aujourd’hui simultanément à l’agression de Poutine contre l’Ukraine, à ses dictateurs protégés en Syrie et dans d’autres pays, ainsi qu’au génocide et à l’occupation sioniste de la Palestine, mis en œuvre par Netanyahou.
Liberté pour les peuples ! Mort aux empires !
i Traduit de <https://litci.org/es/el-dia-de-la-victoria-y-el-falso-antifascismo-del-regimen-de-putin/?utm_source=copylink&utm_medium=browser> par la LCT, la section de la LIT-QI en Belgique.