dim Déc 15, 2024
dimanche, décembre 15, 2024

Déclaration de la Ligue Internationale des Travailleurs sur le conflit États-Unis (OTAN) – Russie – Ukraine

Une fois de plus, l’Ukraine est au centre d’un conflit international qui pourrait ouvrir un conflit militaire de grande ampleur pour le prolétariat d’Europe de l’Est et de toute l’Europe. Une fois de plus, la souveraineté ukrainienne est manipulée pour servir les intérêts de deux bandes contre-révolutionnaires : la Russie de Poutine ; et l’impérialisme étasunien, son OTAN et ses partenaires européens.

Il n’y a pas si longtemps, lorsque les troupes de Poutine sont entrées au Kazakhstan pour réprimer dans le sang la rébellion du peuple kazakh, elles ont été applaudies par les États-Unis et l’UE, révélant ainsi la grande entente entre Poutine, les États-Unis et l’UE lorsqu’il s’agit d’empêcher la souveraineté d’un peuple contre les intérêts du capitalisme russe et mondial.

Nous sommes pour une Ukraine unifiée et libérée de l’oppression russe ; pour la réintégration de la Crimée ; pour le retrait des troupes russes de la frontière orientale, et des organisations paramilitaires russes et ukrainiennes du Donbass. L’impérialisme ne prétend nullement défendre la souveraineté ukrainienne par la réactivation du conflit, au contraire : il s’agit d’une opération visant à transformer le pays en une base militaire de l’OTAN aux frontières de la Russie, c’est-à-dire en une colonie militaire.

La lutte pour la souveraineté de l’Ukraine est étroitement liée à la lutte des classes mondiale et à la crise de l’ordre impérialiste mondial. La guerre qui pointe à l’horizon n’intéresse pas les travailleurs ukrainiens ou russes, ni les travailleurs européens ou nord-américains, ni les travailleurs d’où que ce soit dans le monde.

Dehors les troupes de Poutine et de l’OTAN !

Poutine concentre ses troupes aux frontières de l’Ukraine pour empêcher le gouvernement de Kiev de rejoindre l’OTAN. La faiblesse de la Russie capitaliste à contrôler les anciennes républiques soviétiques conduit Poutine à réveiller le séculaire nationalisme grand-russe, des tsars et du stalinisme, maintenant contre l’Ukraine.

Mais, comme l’expliquait Trotsky, du temps de Lénine, l’Ukraine était un exemple de la politique bolchevique : unir librement les différentes nationalités dans une fédération aux objectifs communs, par la persuasion et non par l’imposition, en générant une force d’attraction entre les nationalités et « un stimulant pour la lutte des ouvriers, des paysans et de l’intelligentsia révolutionnaire de l’Ukraine occidentale asservie par la Pologne ».[1]

En 2014, les masses ukrainiennes se sont soulevées contre Ianoukovitch,[2] qui appliquait un ajustement structurel exigé par le FMI et l’Union européenne (UE), tout en étant politiquement subordonné à Poutine et opposé à l’adhésion à l’OTAN.

Mais au peuple ukrainien manquait une direction prolétarienne, capable de mener la lutte dans un sens socialiste et de contrer les illusions européistes répandues par les partis bourgeois engagés dans la semi-colonisation du pays.

La clique bourgeoise et pro-Kremlin de Ianoukovitch a donc été relevée de ses fonctions par la clique pro-impérialiste de Iatseniouk qui, en 2014, a déclenché une attaque brutale contre les travailleurs. Tout en augmentant le prix du gaz de 50 % et en comprimant les salaires de l’ensemble du prolétariat ukrainien, il a interdit la langue russe dans la région du Donbass, utilisant la haine contre le nationalisme grand-russe comme une arme pour diviser la classe ouvrière.[3]

La classe ouvrière plus concentrée du pays a répondu à ces mesures par un puissant mouvement de grève, avec occupation des mines et des usines, dans la région de Donetsk et de Lugansk. Mais ce grand mouvement a malheureusement profité à des organisations séparatistes pro-russes qui l’ont saboté, empêchant l’unification des travailleurs et du peuple ukrainiens contre la politique de l’impérialisme et de son gouvernement fantoche.

L’accord réactionnaire de Minsk (2015), qui a stoppé l’escalade militaire et a maintenu le statu quo (l’incorporation de la Crimée par Poutine et l’autonomie régionale dans le Donbass), était mort-né. Au fur et à mesure que l’antagonisme accentue la crise de l’ordre impérialiste mondial, la question de l’Ukraine – désormais comme semi-colonie armée par l’OTAN – sera confrontée aux difficultés de Poutine à reprendre en main le mouvement séparatiste dans l’Est du pays.

Le capitalisme russe, dépendant du capital financier européen et fournisseur de gaz et de pétrole à l’industrie allemande, est incapable d’offrir des affaires rentables à la faible bourgeoisie des anciennes républiques soviétiques. Il ne peut maintenir son influence régionale qu’avec des dictatures, soumises au Kremlin et sous menace militaire. Ses agressions, que ce soit en Ukraine, au Kazakhstan[4], en Syrie, en Biélorussie[5], ne sont pas l’œuvre d’un prétendu bloc anti-impérialiste, comme le dépeignent les partis post-staliniens et castristes. Ce sont des actions contre-révolutionnaires d’un pays à la fois dépendant et disposant d’une puissance militaire héritée de l’ex-URSS, pour écraser le mouvement des masses, en faveur des oligarchies soumises.

En 2021, des mobilisations antigouvernementales explosent dans plus d’une centaine de villes russes, suite à l’empoisonnement de l’opposant Navalny. Et elles sont durement réprimées, avec plus de 10 000 arrestations[6]. Dans un pays où les morts dus à la Covid et les troubles sociaux se multiplient, l’agitation pré-guerre de Poutine fait appel au nationalisme grand-russe, faisant taire toute opposition interne.

Poutine ne parvient plus à camoufler ses exigences contre l’incorporation de l’Ukraine dans l’OTAN sous le manteau d’une guerre civile inter-ukrainienne. Il rapproche alors ses troupes de la frontière orientale dans une position d’affrontement avec tout l’impérialisme, menaçant d’une guerre qui s’éterniserait, avec des milliers de morts de part et d’autre.

C’est dans ce contexte que s’insère la politique de l’impérialisme étasunien et de l’OTAN, son bras armé en Europe, qui n’a d’autre but que de convertir un pays entier en une base militaire au service de ses intérêts : renforcer la pression militaire sur la Russie ; gagner du temps pour résoudre sa profonde crise politique interne ; et profiter de la division européenne pour discipliner l’Allemagne.

Les contradictions du camp impérialiste

Les déclarations de l’Allemagne et de la France, ainsi que de l’Italie, s’opposent au ton belliciste de Biden et de l’OTAN, tout en étant sous la coupe des militaires étasuniens. Les principaux impérialismes européens, relégués au rang de spectateurs dans les négociations menées par les États-Unis, voient leurs propres intérêts menacés par les États-Unis, qui utilisent le conflit pour discipliner ces impérialismes, notamment l’allemand.

La Russie exporte 35 % du gaz utilisé par l’Europe, sans compter le réseau Nord Stream1 qui approvisionne directement l’Allemagne en passant par l’Ukraine. Un autre réseau est actuellement en cours de construction, Nord Stream2, qui acheminerait le gaz russe sans passer par l’Ukraine. Les États-Unis s’y sont toujours opposés. Mais pour surmonter la détérioration des relations avec l’Allemagne datant de l’ère Trump, l’accord Biden-Merkel (début 2021) a levé les sanctions étasuniennes contre les entreprises construisant Nord Stream2.

Toutefois, en novembre 2021, les États-Unis ont repris leurs sanctions, paralysant à nouveau le gazoduc, avec le soutien explicite du ministre ukrainien aux Affaires étrangères.

En concentrant ses efforts sur l’endiguement de la Chine, déjà largement affirmé par Biden, les États-Unis exigent une discipline totale de l’impérialisme allemand, même au prix des relations de celui-ci avec la Russie. Dans le même ordre d’idées, les relations des deux pays avec la Chine sapent la priorité des États-Unis.

Une guerre qui n’intéresse pas les travailleurs

Si les termes de l’équation de guerre ne changent pas beaucoup, Poutine ne veut pas d’une guerre à grande échelle avec l’Ukraine. Il préfère maintenir la situation actuelle, celle d’une guerre gelée, dans son jeu de pressions contre l’Ukraine pour empêcher celle-ci de rejoindre l’OTAN. Il est conscient qu’une guerre serait imprévisible.

La fragilité de la Russie et la réorganisation de ses forces armées par les États-Unis mettent la situation sous tension. Et Zelenski, le président ukrainien, aigri par une crise économique et une chute de popularité, en profite pour vendre l’Ukraine plus cher.

Les USA ne veulent pas non plus d’une guerre à grande échelle sur le continent européen. Ils parient sur la tension et sur l’opportunité de forcer un recul de Poutine – en présentant une victoire contre Poutine (et contre Trump, qui lui emboîte le pas) – et de discipliner entre-temps l’Allemagne.

Ce qui distingue la situation actuelle de celle de 2014, c’est qu’il n’y a pas de soulèvement des masses ou d’insurrection en Ukraine contre l’oppression russe. L’offensive russe à l’Est (Donbass) n’a pas non plus pour stratégie de récupérer le terrain perdu par Kiev.

Cette guerre possible n’est pas dans l’intérêt des travailleurs ukrainiens ou russes, ni des travailleurs européens ou nord-américains, ni d’aucun autre travailleur.

Nous réaffirmons que la Russie n’a aucun droit sur l’Ukraine. Pour se défendre des troupes de l’OTAN à ses frontières, elle devrait appeler à une grande mobilisation des peuples ukrainien, européen, nord-américain… et russe, contre l’avancée des troupes de l’OTAN ; mais ses oligarques, soutenus par un État autoritaire, craignent davantage les masses en mouvement que l’impérialisme.

– Pour la fin de l’OTAN. Dehors ses troupes et les bases étasuniennes dans les pays de l’Europe occidentale et les pays de l’Est !

– Pour la fin de l’alliance militaire de l’OTSC (Organisation du traité de sécurité collective) entre la Russie et les anciennes républiques soviétiques, utilisée pour envoyer des troupes, comme lors du soulèvement du Kazakhstan !

– Pour une Ukraine unifiée, libérée de l’oppression russe et de celle de l’Europe, les États-Unis et l’OTAN !

Source: https://litci.org/pt/65981-2/

 

[1] León Trotsky. A quest ão ucraniana https://litci.org/pt/a-questao-ucraniana/

[2] https://www.pstu.org.br/sobre-a-queda-de-yanukovich-na-ucrania/

[3] https://litci.org/pt/declaracao-da-lit-qi-sobre-a-situacao-da-ucrania/

[4] https://litci.org/pt/um-levante-popular-no-cazaquistao/

[5] https://litci.org/pt/uma-revolucao-sacode-a-bielorrussia/

[6] https://litci.org/pt/russia-liberdade-a-todos-os-presos-politicos-abaixo-a-repressao/

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