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Importante mobilisation des fonctionnaires le 8 février

La journée de mobilisation des fonctionnaires, le 8 février 2007, a réuni plus de 180 000 personnes dans toute la France, dont près de 80 000 à Paris. Officiellement, il y a eu plus de 20% de grévistes dans la fonction publique ; dont près de 50 % dans l’éducation nationale, entraînant la fermeture de plusieurs établissements scolaires. A titre de comparaison, le nombre de personnes ayant défilé cette fois-ci est à peu près similaire à celui de la manifestation des fonctionnaires du 2 février 2006 (à la veille de la mobilisation contre le CPE), une « journée d’action » où le taux de grévistes avait été de 18%. Un premier constat s’impose donc : cette journée (qui faisait suite à la manifestation du 25 janvier ayant regroupé près de 30 000 enseignants à Paris) a bénéficié d’une importante mobilisation.


 


Une mobilisation qui s’est faite contre la volonté des directions syndicales. Dans une situation politique encadrée par l’élection présidentielle du mois d’avril 2007, ces directions font tout pour que la lutte des classes ne vienne pas perturber la campagne électorale. A cet égard, la prise de position de la FSU, lors de son


dernier congrès début 2007, est très emblématique : elle veut « peser » dans le débat des élections présidentielles en s’adressant aux candidats.


 


La FSU adopte cette position alors même que les fonctionnaires en général et les enseignants en particulier font l’objet d’attaques sans précédent : plus de 15 000 suppressions de postes dans la fonction publique (dont 5 500 dans l’éducation nationale), abrogation du décret de 1950 et création de la bivalence pour les enseignants, etc. La CGT adopte une position similaire : dans son communiqué publié le 9 février 2007, elle déclare que « La journée du 8 février est une réelle contribution syndicale dans ce débat électoral ».


 


Les autres directions syndicales ne sont pas en reste. Ainsi, l’appel à la manifestation du 8 février (sorti de l’intersyndicale de l’éducation nationale du 18 janvier 2007) était très vague quant aux objectifs à atteindre à l’occasion de cette journée. L’appel parlait de perte de pouvoir d’achat et de détérioration des conditions de travail, mais sans lier ces problèmes à des revendications concrètes et précises.


 


Pourtant, la dégradation du service public ainsi que les menaces de démantèlement et de privatisations sont patentes. Le quasi blocage du traitement de base, la réforme des corps et grades de la fonction publique (qui ressemble comme une soeur à celle imposée aux PTT en 1990) et l’explosion de la précarité font peser de lourdes menaces sur le pouvoir d’achat et l’emploi public. Tout cela est très durement ressenti par les fonctionnaires, par les agents de l’Etat et par les précaires de toutes les administrations.


 


On pourrait aussi parler de l’avenir des retraites, ou bien de la fameuse « loi de modernisation de la fonction publique ». Publiée le 6 février au Journal Officiel, cette loi stipule notamment que les fonctionnaires de l’Etat et les militaires pourront désormais « bénéficier » de l’assurance chômage. La chose ayant été remarquée lors du débat à l’Assemblée nationale, les Sainte-nitouche du bureau confédéral et des organisations de fonctionnaires de la CGT se sont discrètement émues et ont demandé des explications au ministère concerné, au Directeur général de l’administration et de la fonction publique. D’après ce monsieur, il s’agit d’une simple mesure « technique » destinée à clarifier la situation des fonctionnaires de l’Etat. De quoi rassurer les dirigeants de la CGT : le Statut de la Fonction publique d’Etat avait grand besoin d’une telle clarification «technique» après 61 ans d’existence (22, dans sa version de 1984) !


 


Les motifs légitimes de mobilisation ne manquent donc pas, ce qui souligne d’autant plus fortement le scandale des « journées d’actions ». De surcroît, la volonté d’empêcher un 8 février massif s’est ouvertement exprimée dans l’organisation de la manifestation. A Paris, par exemple, deux manifestations distinctes ont été convoquées : celle des cheminots, qui n’avait même pas de préavis de grève ; et celle regroupant les autres fonctionnaires. Les deux cortèges partaient presque du même endroit, arrivaient presque au même endroit, mais n’empruntaient pas le même parcours : comme si les revendications et les intérêts des cheminots étaient différents de ceux des autres fonctionnaires !


 


Après le succès du 8 février, les directions syndicales continuent de boucher les perspectives de mobilisation pour les travailleurs. Ainsi, l’intersyndicale intervenue suite à cette manifestation n’a même pas proposé de nouvelle date de manifestation : elle en est restée à « soutenir les actions locales académiques durant la période des vacances » mais « n’a pas trouvé d’accord pour lancer un nouvel appel à la grève en mars ». Alors que plus que jamais il faut unifier les luttes, les mobilisations, les revendications, les directions syndicales font précisément le contraire.


 


Néanmoins, la marge de manoeuvre des directions syndicales est de plus en plus étroite. Pour ne prendre que ces dernières années, elles sont montées en première ligne pour empêcher que les mobilisations des jeunes et des travailleurs n’aillent plus loin, notamment lors du mouvement contre la réforme des retraites en 2003 et lors du mouvement contre le CPE en 2006. Et encore, l’unité réalisée lors de ces mobilisations n’a pas émané des directions, elle a été imposée par la détermination des jeunes et des travailleurs !


 


En définitive, il existe un accord de fond des directions syndicales pour avancer sur le voie du « diagnostique


partagé » avec le MEDEF et le gouvernement, accord matérialisé lors de la conférence du 14 décembre dernier sur « l’emploi et les revenus ». Pour les syndicats, cet accord implique de prendre en charge une part importante de la définition et de l’application des «contre-réformes» gouvernementales, celles exigées par les capitalistes et encadrées par les traités et directives européens.


 


Alors qu’elles s’engagent de plus en plus ouvertement dans la voie de leur intégration à l’Etat, les directions syndicales, liées pour l’essentiel au PS et au PCF, vont apporter leur « réponse » à l’attente des travailleurs ; réponse qui, dans leur optique, ne doit pas déboucher sur une explosion sociale. De là, le pari risqué des journées d’action à répétition, comme celle du 8 février.


 


Cependant, l’ampleur de la mobilisation du 8 février 2007, malgré toutes les manoeuvres opérées par les directions syndicales, exprime la disposition et la volonté des travailleurs à se saisir de toutes les occasions pour se mobiliser contre les attaques du gouvernement.


 


La proximité des échéances électorales n’y change rien, et c’est bien le problème posé aux dirigeants du PCF et du PS qui, eux, ont déjà entériné les « évolutions » exigées par les capitalistes. Dans l’état actuel des choses, il est donc difficile de prévoir si les directions syndicales réussiront effectivement à contenir la mobilisation des travailleurs. Aussi, il faut s’appuyer sur l’ampleur de la mobilisation du 8 février pour unifier les luttes et stopper les attaques du gouvernement contre les travailleurs.

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